Noël 2022 : Message “Urbi et Orbi” du Pape François

Chers frères et sœurs de Rome et du monde entier, joyeux Noël !
Que le Seigneur Jésus, né de la Vierge Marie, vous apporte à tous l’amour de Dieu, source de confiance et d’espérance, ainsi que le don de la paix annoncée par les anges aux bergers de Bethléem : « Gloire à Dieu dans la au plus haut des cieux et paix sur la terre à ceux qu’il aime » (Lc 2, 14).
En ce jour de fête, nous tournons notre regard vers Bethléem. Le Seigneur vient au monde dans une étable et est couché dans une mangeoire pour animaux, puisque ses parents n’ont pu trouver de place dans l’auberge, même si le temps était venu pour Marie d’accoucher. Il vient parmi nous en silence et dans l’obscurité de la nuit, car la parole de Dieu n’a pas besoin de projecteurs ou de voix humaines fortes. Il est lui-même le Verbe qui donne son sens à la vie, il est la Lumière qui éclaire notre chemin. « La vraie lumière, qui éclaire tous les hommes », nous dit l’Évangile, « venait dans le monde » (Jn 1, 9).
Jésus est né au milieu de nous ; il est Dieu avec nous. Il vient accompagner notre quotidien, partager avec nous en toutes choses : nos joies et nos peines, nos espoirs et nos peurs. Il vient comme un enfant sans défense. Il est né dans la nuit froide, pauvre parmi les pauvres. Ayant besoin de tout, il frappe à la porte de notre cœur pour trouver chaleur et abri.
Comme les bergers de Bethléem, entourés de lumière, puissions-nous partir pour voir le signe que Dieu nous a donné. Puissions-nous surmonter notre somnolence spirituelle et les paillettes superficielles des fêtes qui nous font oublier Celui dont nous célébrons la naissance. Laissons derrière nous la tonalité et le vacarme qui étouffent nos cœurs et nous font passer plus de temps à préparer des décorations et des cadeaux qu’à contempler le grand événement : le Fils de Dieu né pour nous.
Frères et sœurs, tournons nos yeux vers Bethléem, et écoutons les premiers cris faibles du Prince de la Paix. Car vraiment Jésus est notre paix. La paix que le monde ne peut donner, la paix que Dieu le Père a accordée à l’humanité en envoyant son Fils dans le monde. Saint Léon le Grand a résumé le message de ce jour dans une phrase latine concise : Natalis Domini, natalis est pacis : « la naissance du Seigneur est la naissance de la paix » (Serm. 26, 5).
Jésus-Christ est aussi le chemin de la paix. Par son incarnation, sa passion, sa mort et sa résurrection, il a ouvert la voie qui mène d’un monde fermé sur lui-même et oppressé par les ténèbres de l’inimitié et de la guerre, à un monde ouvert et libre de vivre dans la fraternité et la paix. Frères et sœurs, suivons ce chemin ! Pourtant, pour ce faire, pour pouvoir marcher derrière Jésus, nous devons nous débarrasser des fardeaux qui nous pèsent et bloquent notre chemin.
Quels sont ces fardeaux ? Quel est ce poids mort ? Les mêmes forces négatives qui ont empêché le roi Hérode et sa cour de reconnaître et d’accueillir la naissance de Jésus : attachement au pouvoir et à l’argent, orgueil, hypocrisie, mensonge. Ces forces nous empêchent d’aller à Bethléem ; ils nous excluent de la grâce de Noël et ils bloquent l’entrée du chemin de la paix. En effet, nous devons reconnaître avec tristesse que, alors même que le Prince de la Paix nous est donné, les vents glacials de la guerre continuent de secouer l’humanité.
Si nous voulons que ce soit Noël, la Naissance de Jésus et de la paix, regardons vers Bethléem et contemplons le visage de l’Enfant qui est né pour nous ! Et dans ce petit visage innocent, voyons les visages de tous ces enfants qui, partout dans le monde, aspirent à la paix.
Voyons aussi les visages de nos frères et sœurs ukrainiens qui vivent ce Noël dans le noir et le froid, loin de chez eux à cause des ravages causés par dix mois de guerre. Que le Seigneur nous inspire à offrir des gestes concrets de solidarité pour aider tous ceux qui souffrent, et qu’il éclaire l’esprit de ceux qui ont le pouvoir de faire taire le tonnerre des armes et de mettre un terme immédiat à cette guerre insensée ! Tragiquement, nous préférons suivre d’autres conseils, dictés par les modes de pensée mondains. Mais qui écoute la voix de l’Enfant ?
Notre époque connaît une grave famine de paix également dans d’autres régions et d’autres théâtres de cette troisième guerre mondiale. Pensons à la Syrie, encore meurtrie par un conflit passé au second plan mais qui n’est pas terminé. Pensons aussi à la Terre Sainte, où ces derniers mois la violence et les affrontements se sont multipliés, entraînant dans leur sillage morts et blessés. Implorons le Seigneur que là-bas, sur la terre qui l’a vu naître, le dialogue et les efforts pour construire une confiance mutuelle entre Palestiniens et Israéliens puissent reprendre. Que l’Enfant Jésus soutienne les communautés chrétiennes vivant au Moyen-Orient, afin que chacun de ces pays puisse vivre la beauté de la coexistence fraternelle entre des individus de confessions différentes. Puisse l’Enfant Jésus aider le Liban en particulier, pour qu’il puisse enfin rebondir avec l’aide de la communauté internationale et avec la force née de la fraternité et de la solidarité. Que la lumière du Christ illumine la région du Sahel, où la coexistence pacifique entre les peuples et les traditions est perturbée par les conflits et les actes de violence. Puisse cette lumière conduire à une trêve durable au Yémen et à la réconciliation au Myanmar et en Iran, et à la fin de toute effusion de sang. Puisse-t-elle inspirer les autorités politiques et toutes les personnes de bonne volonté des Amériques à tenter d’apaiser les tensions politiques et sociales vécues par divers pays; Je pense en particulier au peuple haïtien qui souffre depuis longtemps.
En ce jour, alors que nous sommes assis autour d’une table bien dressée, ne détournons pas notre regard de Bethléem, une ville dont le nom signifie « maison du pain », mais pensons à tous ceux, en particulier les enfants, qui ont faim alors que d’énormes quantités de nourriture tous les jours sont gaspillés et les ressources sont dépensées en armes. La guerre en Ukraine a encore aggravé cette situation, mettant des peuples entiers en danger de famine, notamment en Afghanistan et dans les pays de la Corne de l’Afrique. Nous savons que chaque guerre cause la faim et exploite la nourriture comme une arme, entravant sa distribution aux personnes déjà souffrantes. En ce jour, apprenons du Prince de la Paix et, à commencer par ceux qui détiennent des responsabilités politiques, engageons-nous à faire de la nourriture uniquement un instrument de paix. Et alors que nous prenons plaisir à nous retrouver avec nos proches, pensons aux familles qui vivent de grandes difficultés et à celles qui, en cette période de crise économique, se débattent à cause du chômage et manquent des nécessités de la vie.
Chers frères et sœurs, aujourd’hui comme alors, Jésus, la vraie lumière, vient dans un monde gravement malade d’indifférence, un monde qui ne l’accueille pas (cf. Jn 1, 11) et même le rejette, comme il le fait avec beaucoup d’étrangers, ou l’ignore, comme nous le faisons trop souvent avec les pauvres. N’oublions pas aujourd’hui les nombreux déplacés et réfugiés qui frappent à notre porte en quête de réconfort, de chaleur et de nourriture. N’oublions pas les marginalisés, les isolés, les orphelins, les personnes âgées, qui sont la sagesse de leur peuple, qui risquent d’être mis à l’écart, et les prisonniers, que nous ne considérons que pour les erreurs qu’ils ont commises et non comme nos semblables et femmes.
Frères et sœurs, Bethléem nous montre la simplicité de Dieu, qui ne se révèle pas aux sages et aux intelligents, mais aux petits, à ceux qui ont un cœur pur et ouvert (cf. Mt 11, 25). Comme les bergers, partons nous aussi en hâte et laissons-nous émerveiller par l’événement impensable de Dieu qui se fait homme pour notre salut. Lui, la source de tout bien, se fait pauvre, demandant en aumône notre pauvre humanité. Laissons-nous toucher profondément par l’amour de Dieu. Et suivons Jésus, qui s’est dépouillé de sa gloire pour nous donner part à sa plénitude.
Le Hautpanel